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23 octobre 2011 7 23 /10 /octobre /2011 15:26

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L'auteur belge Michel de Ghelderode est davantage connu pour on oeuvre de dramaturge (dont je connais la réjouissante farce médiévale et apocalyptique La Balade du Grand Macabre) que de nouvelliste. Il faut avouer que ses contes sont peu (ré)éditées en français, ce qui est bien dommage, car la lecture de Sortilèges, paru chez Gallimard "L'Imaginaire" me permet d'affirmer que même en faisant abstraction de la patrie commune des deux auteurs, on tiens un égal de Jean Ray dans la nouvelle fantastique.

 

  Si les nouvelles qui composent ce recueil trouvent leur unité dans un même fantastique gothique et effrayant, versant volontiers dans l'excès du grotesque (au sens neutre du terme, bien sûr, c'est bien à Poe qu'on pense), elles n'en sont pas moins très diverses. Certaines lorgnent ainsi davantage vers le terreur pure que d'autres : Le Jardin malade, dont l'horreur est le plus visuelle, Brouillard et Tu fus pendu où elle est plus insidieuse, sont peut être les plus aptes à vous faire passer de bonnes nuits.  A l'inverse, d'autres, comme RhotomagoLe Diable à Londres, combine le grotesque à la Poe à un certain humour, voir à une certaine tendresse dans la seconde nouvelle. L'odeur du sapin, qui clot le recueil, est d'ailleurs un compromis entre ces deux tendances, car son humour à froid ne l'empêche pas d'être la plus "trash" du recueil, en plus de recéler son lot d'images impressionnantes.

  D'autres nouvelles, bien que guère joyeuses, ne recherchent pas pour autant l'effroi pur mais avant tout des images saisissantes, et c'est là que la prose de Ghelderode atteint des sommets : la nouvelle qui donne son titre au recueil en est l'apogée mes yeux, véritable bijou du début à la fin, et Un Crépuscule lui fait de la concurrence à l'échelle moins grandiose d'une courte vignette.

 

  Il est bien sûr hors de question de faire l'inventaire de toutes les nouvelles du recueil, mais je ne ferais pas non plus celui de leurs tons respectifs, car la tâche est trop ardue en regard de la palette de registre que peux déployer l'auteur dans le registre du fantastique. Il est plus intéressant de noter ce qui les lie et fait donc la patte du nouvelliste : une ambiance gothique certes, un sens de l'image saisissante qui touche au sublime dans bien plus d'une nouvelle, et également un état d'esprit qui renforce l'épouvante de l'univers par son caractère trivial : le thème de la dépression, ceux associés de la déchéance qui peut être celle de la maladie, de la vieillesse, des deux, et l'approche de la mort, obsession bien connue de Ghelderode. La dépression est décrite de façon particulièrement poignante dans Un Crépuscule, qui en est une sorte de mise en image fantasmatique, dans Sortilèges où elle est le pivot de l'argument fantastique, dans Le Diable à Londres où elle fait rejaillir la tendresse inattendue...mais il va de soit que je ferais pas dans l'exhaustivité pour ce thème là non plus. 

 

  Les nouvelles de Ghelderode semblant assez rares en français et en éditions trouvables, n'hésitez pas à vous précipiter sur ce magnifique cauchemar.     

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