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15 décembre 2014 1 15 /12 /décembre /2014 16:14

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/4/40/Jean_rollin_at_his_home.jpgJusqu'à il y a peu, je ne connaissais pas grand-chose de Jean Rollin. De son vivant, son nom était surtout associé dans mon esprit au site Nanarland, et à ses productions alimentaires ( de Rollin, pas de Nanarland). Il m'a fallu, comme un gros boulet, attendre son décés (qui par un étrange hasard dont je viens tout juste de m'aperçevoir, est survenu quatre ans jour pour jour avant que je ne découvre ces films ce matin même. Oui, je sais, aucun intérêt) pour avoir vent que le monsieur avait réalisé une oeuvre personnelle  bien au-dessus dédites productions alimentaires. Pour que je me botte enfin le fondement et explore un peu la chose, il ma fallu un déclic bien plus récent, en apprennant, par diverses lectures de Pierre Dubois, et notamment la préface par Jean-Luc Porquet des Chroniques du Nord Sauvage, que Rollin comptait parmi les illustres amis de l'elficologue.  Je me suis donc empressé de me procurer Le Frisson des vampires et Les Démoniaques, les deux premiers films que j'ai pu dénicher.

 

  Ces deux films, datant respectivement de 1970 et 1973, mêlent fantastique gothique et érotisme. Dans le premier, un couple sur le point de se marier s'installe dans le château des défunts cousins de la jeune femme, Ise, où la jeune femme s'éprend de la belle vampire Isolde. Dans le second, une bande de naufrageurs (l'idée de naufrageur exercant leur tâche à l'heure actuelle est un merveilleux exemple du peu de cas que Rollin fait du réalisme, pour notre plus grand bonheur), se voit persecutée par les spectres de deux jeunes soeurs qu'ils ont assassinées.

  Par où commencer pour décrire ces deux ovnis filmiques ?  Par dire d'abord qu'on ne sait pas très bien si ceux-ci sont de gros nanars ou des films géniaux : ils sont probablement les deux à la fois. C'est ultra-fauché, plus proche de la série Z que de la série B, c'est affreusement mal joué...et pourtant...

  D'abord, la mise en scène suffirait à elle seule à sauver l'ensemble. Ce n'est pas du tout l'oeuvre d'un tâcheron, c'est au contraire du grand Art, avec des plans et un montage complétement fous, lesquels sont un peu plus sages dans Les Démoniaques, mais celui-ci explore davantage une esthétique expressionniste qui sied très bien à l'atmopshère gothique (le film est carréement crédité au générique "un film expressionniste de Jean Rollin")  offrant des plans superbes comme celui où les deux jeunes filles émergent de la nuit en robe blanche après leur naufrage. On ne compte plus d'ailleurs les plans magnifiques dans les deux films, comme ceux qui clôturent, justement, Les Démoniaques. La musique (rock progressif dans Le Frisson des vampires, plus classique dans Les Démoniaques) est plus généralement la bande-son sont surprenantes. A noter que Les Démoniaques est nettement moins lent que Le Frisson des vampires, la lenteur étant un moindre défaut dont il faut s'accomonder avec les films de Rollin, même si je ne me suis pas ennuyé un instant avec ces deux spécimens, moi qui ne suit pourtant pas un grand fan des films lents. 

    Mais pour ne pas se limiter à ces préoccupations formalistes, et laisser danvantage part au rêve, celui-ci s'incarne merveilleusement dans ce cinéma animé par la folie douce, ou même les inventions les plus ridicules, les plus nanardesques, apportent une plus-value à un délire narratif et visuel que n'aurait pas renié les surréalistes, de sorte que même l'esthétique gothique semble un retour aux sources du mouvement bretonien. Cet univers paraîit encore un peu immature, plus proche du nanar, dans Le Frisson des vampires et son bric-à-brac occulte outrancier, mais ce dernier laisse déjà éclater, notamment dans les décors et certains plans bizarres (la...statue qui tourne sur elle-même ?), un délire visuel sans équivalent dans le cinéma fantastique. Ce dernier éclate dans toute sa splendeur dans Les Démoniaques, et même si le ridicule n'est certes pas absent de ce dernier, certains de ses morceaux de bravoure gothiques ne dépareraient pas dans un Bava ou un Argento (la première scène de hantise !).

 

  Même si ces films ne sont certes pas des chef-d'oeuvres et même s'il est certain qu'ils prêtent à rire (j'ai moi-même pas mal ri, malgré le fait que j'étais seul et à jeun) ils ne peuvent en aucun cas être réduits à des nanard risibles. Les films de Rollin  sont l'antithèse à la fois du divertissment formaté et d'un certain cinéma d'auteur bobo-branchouille qui l'est tout autant, et plus largement ils sont un magistral pied-de-nez au diktats du bon goûts qui envahissent nos magazines de cinéma pour étouffer notre curiosité et notre imagination. Ils s'avérent probablement plus difficiles d'accés que bien des productions intellectualisantes. Si même une honnête série B vous semble risible, il ya peu de chance que vous goûtiez la poésie particulière de Rollin. Ca passe ou ça casse, selon les personnes, mais ça mérite le coup d'oeil. 

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